jeudi 12 juillet 2012

Un bonheur n'arrive jamais seul



Gad et Sophie ont lancé comme un défi, etc...*

Derrière un titre en lettres roses qui n'aurait pas dépareillé en une de Cosmo, Gad et Sophie forment un couple heureux, ça se voit dans leurs yeux illuminés de béatitude. Leurs regards emplis d'amour ne sont d'ailleurs pas sans rappeler celui du cocker reconnaissant à qui on vient d'accorder ses croquettes quotidiennes.

Rien qu'à l'affiche, ça avait l'air à chier, mais j'avais tout de même choisi d'accorder le bénéfice du doute à ce petit film sans prétention. Hélas, alors que l'Arnacoeur avait apporté la preuve que le cinéma français pouvait accoucher d'excellentes comédies romantiques,  Un Bonheur... nous offre un très bel inventaire de ce qu'il ne faut pas faire lorsque l'on s'attaque au genre.


La vie en rose

L'idée de départ est ici de jouer sur l'opposition entre un quadragénaire éternel ado et une mère de trois enfants qui, fatalement, tombent amoureux au premier regard. Après tout, pourquoi pas. Sauf que le scénario a manifestement été écrit à la truelle.

En plus de recourir à des mécanismes usés jusqu'à la corde, les auteurs ne se sont encombrés d'aucune forme de subtilité, n'hésitant pas à faire usage de la guimauve la plus écœurante qui soit.
La scène de rencontre est assez emblématique du degré d'affliction que ce film est capable de susciter. Je vous pose donc rapidement le tableau : nos deux protagonistes sont pris dans une violente averse, mais à peine commencent-ils à comprendre qu'ils sont faits l'un pour l'autre que la pluie s'arrête par magie. Voilà. Alors, c'est pas une idée de mise en scène qui déchire, ça ? Ouais, c'est tout pourri, en fait...

Le film tout entier est traversé de ce genre de niaiseries, et il est inutile d'espérer beaucoup mieux quand il s'agit d'assurer un minimum de crédibilité à cette histoire. Un autre exemple pour le plaisir : la crise d'adolescence dans le monde d'Un Bonheur..., ça consiste à faire la gueule pendant la partie de bowling familial et à refuser un Coca généreusement offert par le nouveau copain de Maman. L'ado en question finit quand même par accepter un Ice Tea, faut quand même pas déconner.


One man movie

Difficile enfin de passer sous silence la prestation de Gad Elmaleh, qui a au moins le mérite d'être constant dans la médiocrité (ceux qui ont subi La Rafle comprendront). Le film capitalise énormément sur la popularité de l'humoriste et celui-ci, pleinement conscient de la responsabilité pesant sur lui, se démène comme il peut pour essayer de relever le niveau. Toute cette bonne volonté ne suffit pas pour en faire un acteur digne de ce nom : Gad Elmaleh est tout simplement incapable de jouer dans la nuance et ne parvient jamais à sortir de son costume d'homme de scène. Sur grand écran, ça passe forcément beaucoup moins bien.


Navet-métrie :


* Si vous avez capté la référence, vous êtes vraiment balèzes

mardi 3 juillet 2012

La Clinique de l'Amour



 Maîtresses et patients

Avec son titre affligeant et ses personnages affublés de prénoms américains ringards, ce projet partait avec un capital-sympathie bien supérieur à la moyenne. La Clinique de l'Amour se veut en effet être une parodie des soap-operas hospitaliers, qui revendique pour référence la grande tradition des ZAZ (série des Y-a-t-il...). La séquence d'exposition est d'ailleurs franchement prometteuse : Priscilla, une ravissante infirmière, se marie avec le chirurgien Michael Marshall, au grand détriment du frère de ce dernier, John, qui en est depuis toujours secrètement amoureux (de Priscilla, pas de son frère). Alors que John s'exile au Canada par dépit, l'arrivée à la clinique de Samantha, séductrice avide de pouvoir et d'argent, ne laisse pas Michael indifférent. Une intrigue digne des meilleurs moments de Nous Deux qui laisse espérer un film jubilatoire. Hélas...

 
Amour, gloire, et raté

Réussir une parodie n'est pas chose aisée : être trop respectueux de son sujet, c'est oublier de le tourner en dérision ; prendre trop de distance avec celui-ci, c'est manquer de pertinence. La Clinique de l'Amour n'est pas dans un de ces extrêmes, il est carrément dans les deux à la fois. Le film accorde ainsi une importance démesurée à un scénario rocambolesque dont on se contrefout - à tel point que l'on se demande parfois s'ils n'ont pas VRAIMENT pris ça au sérieux - mais  n'hésite pas pour autant à partir dans un délire mettant en scène l'amitié d'un des personnages avec un ours (oui, l'ours de l'affiche) sans que l'on ne comprenne bien ce que cela vient faire là. Cette improbable mécanique ne fonctionne pas et, plus gênant encore, oublie trop souvent de faire rire.


Fail anatomy

On pardonnerait volontiers à La Clinique de l'Amour ce positionnement foireux s'il se montrait un peu plus généreux dans son humour. Sauf que les auteurs ont visiblement eu si peu d'inspiration qu'ils semblent s'être résignés à recycler les mêmes effets d'une scène sur l'autre. Manque de bol, ça finit par se voir. Et cette propension à user du running gag paraît un peu trop systématique pour ne pas dissimuler une écriture paresseuse, qui se contente du minimum syndical.

Revoyez plutôt l'excellent sketch des Inconnus ("quoi, à l'hôpital Velpeau ?"), vous y rirez plus en cinq minutes que pendant l'heure et demie ce long métrage poussif.


Navet-métrie :

dimanche 1 juillet 2012

Les bons plans du moment

L'Age de Glace 4 : la dérive des continents


Si ce nouvel épisode ne renouvelle pas la série en profondeur, on y retrouve les points forts qui ont fait son succès : c'est spectaculaire, rythmé et plein d'humour. Comme toujours, les mésaventures de Scrat constituent une inestimable plus-value.



 
Le Grand Soir


Un western en zone commerciale sur le thème du renoncement et de la punkitude désenchantée. Drôle et étonnant, ce film ne ressemble qu'à lui-même. Poelvoorde y est inoubliable en plus vieux punk à chiens d'Europe.




De Rouille et d'Os


Jacques Audiard réussit son incursion dans le mélo et livre une œuvre incroyable de maîtrise, qui parvient à se faire à la fois délicate et intense. Un grand film, qui doit aussi beaucoup à Matthias Schoenaerts et Marion Cotillard.


Adieu Berthe, l'enterrement de mémé



Le traquenard du samedi soir

Le diable est dans les détails. A la base, j'étais parti pour voir l'Age de Glace 4. Oui mais voilà, j'avais oublié mes lunettes 3D à la maison. Bien décidé à ne pas subventionner d'un euro supplémentaire cette hérésie qu'est le cinéma en 3D, je me rabats finalement sur Adieu Berthe, qui avait bénéficié d'un accueil critique plutôt favorable. Autant dire que je n'étais pas préparé à l'expérience que je m'apprêtais à vivre. Et pourtant...

Grosso modo, le samedi soir, la fréquentation des cinémas se distingue en trois catégories : les familles venues voir le film d'animation du moment, les bobos en pèlerinage pour le Woody Allen annuel, et les ados qui sont là pour nourrir leur culture cinéphile du dernier Michael Bay entre deux pelletées de pop corn. Mais en cette salle n°9 où était projeté Adieu Berthe, point de famille, ni de bobo, et encore moins d'ado à pop corn. Des vieux, rien que des vieux. Je devais dès lors me rendre à l'évidence : la porte de la salle n°9 était en fait une faille spatio-temporelle vers un monde parallèle où des vieux viennent voir des films de vieux. Je n'ai pas trouvé la force de fuir à ce moment précis, la suite allait me le faire regretter.

 
On doit pas avoir le même sens de l'humour...

Pour la faire courte, Adieu Berthe, c'est l'histoire d'un type qui a érigé l'indécision en art de vivre et qui doit organiser les obsèques d'une grand-mère qu'il avait depuis longtemps oubliée. Croyez-le ou non, mais ils ont réussi à bricoler un film sur ce pitch. Un film très chiant, mais un film quand même : ils en ont même fait une comédie ! Enfin ça, c'est ce qu'ils disent sûrement dans le dossier de presse, parce que pour ma part, je cherche encore ce qu'il y a de drôle dans ce film.

Pour vous situer un peu le niveau, je ne résiste pas à l'envie de vous proposer un petit jeu. Trouvez la réplique d'une petite fille qui vient après la ligne de dialogue suivante :

 " Je dois y aller, il faut que je m'occupe des pompes funèbres".

 Réponse : "c'est quoi les pompes funèbres, une marque de chaussure ?"


7 lettres : laxatif

Oui, c'est pas drôle. Mais les vieux dans la salle, ça avait l'air de bien les faire rire, eux ! C'est alors que mon esprit a fait le lien avec un monument du paysage audiovisuel français, j'ai nommé des Chiffres et des Lettres. Pour ceux à qui il n'est jamais arrivé de regarder cette émission, le trio Laurent Romejko / Betrand Renard / Arielle Boulin-Prat y rivalise d'imagination pour placer ses vannes en carton entre deux tirages, sous les applaudissements d'un public tout droit sorti d'une maison de retraite. Le tout encadré par des pubs vantant les mérites des pompes funèbres et des conventions-obsèques.  


Pompes funèbres, humour moisi, public du troisième âge... Tous les éléments du puzzle étaient en place : Adieu Berthe est en fait une adaptation en loucedé des Chiffres et des Lettres. Une fois cette imposture démasquée, j'ai pu quitter la salle sans regret - après 50 minutes de souffrance tout de même - et revenir dans le monde réel.


Navet-métrie :

Ce qui vous attend si vous attendez un enfant



On vous avait pourtant prévenus... 

Voilà typiquement le genre de daube que l'on peut flairer à des kilomètres. Non content d'adapter un guide pratique sur la grossesse (oui, ils ont osé) pour exploiter le filon du film choral niaiseux et inoffensif (Valentine's Day pour la Saint-Valentin, Happy New Year pour le Nouvel An, Lépreux's Day pour la journée mondiale de la lèpre bientôt sur vos écrans), Ce qui vous attend... se paie également le luxe d'afficher la présence de Jennifer Lopez au casting. Et J-Lo, c'est quand même le genre d'actrice qui présente de grosses garanties quand il s'agit de présumer de la (non) qualité d'un film.

Comment, dans ces conditions, ai-je pu me retrouver à une projection de ce qui s'annonçait être un navet intersidéral ? La réponse assez simple : deux collègues de travail directement concernées par le sujet m'annoncent leur intention de subir cette purge, et après quelques tergiversations, je me décide à les accompagner en me disant que ça pouvait être marrant de voir ce truc tout pourri. Le moins qu'on puisse dire, c'est que je n'ai pas été déçu.


La stratégie de l'échec 

Ce qui vous attend... est absolument fascinant dans sa manière d'organiser méthodiquement, et pourtant de manière totalement involontaire, son propre sabordage. C'est simple, ils auraient voulu faire un film aussi raté qu'ils n'y seraient pas arrivés.

Commençons par le chapelet de clichés qui sert de trame scénaristique (si on peut appeler ça un scénario). Voyons voir, qu'est-ce qu'on pourrait bien retrouver dans un film qui parle de la maternité ? Un couple qui galère pour avoir un enfant ? Check. Une femme que la grossesse a tendance à rendre légèrement hystérique ? Check. Une post-ado enceinte malgré elle après une galipette de trop sur le capot d'une voiture (pour elle, par contre, ça marche du premier coup) ? Check. Et en bonus, on vous offre le couple de bourgeois américain qui part en Ethiopie adopter un adorable petit noir. Ce film ne recule devant aucun stéréotype, le tout avec des personnages si peu caractérisés qu'ils en deviennent presque interchangeables. 


Rire et guimauve

Mais à la rigueur, on s'en fout un peu, on n'est pas venu pour une étude sociologique. Ce qui vous attend... est avant tout une comédie ! De ce côté-là, le ton est donné d'entrée de jeu, puisque le premier effet consiste à voir Cameron Diaz gerber dans un trophée : autant dire qu'on part sur des bases très élevées. Ce n'est là que la première fusée d'un feu d'artifice scatologique où se mêlent pet, rot, pipi et caca (c'est bon, ils sont tous là). Bon, je suis un peu de mauvaise foi, il n'y a pas que ça non plus... mais il faut dire que la relative vulgarité de ce film est forcément plus voyante quand elle surgit entre deux élans de mièvrerie. Car, comme on pouvait s'en douter, la morale de l'histoire, c'est qu'il n'y a rien de plus beau qu'être parents. Voilà, voilà, vous pouvez rentrer chez vous, maintenant, et méditer là-dessus.

Ce qui vous attend... m'aura quand même convaincu que la nullité au cinéma pouvait être captivante quand elle était aussi radicale, ce qui n'est déjà pas si mal pour un film affichant si peu d'ambition. Et il y a même une vanne VRAIMENT drôle au début. Comme quoi, il ne faut jamais désespérer de rien.

Quant à mes collègues, je dois avouer une certaine fébrilité au moment d'entendre leurs commentaires à la sortie de la salle. En fait, elles ont trouvé ça très mauvais, elles aussi. C'est bon, je peux encore leur parler.


Navet-métrie :